Les huîtres de L’Istrec

Carte géographique de la ria d’Etel

Géographie de L’Istrec

Les huîtres de L’Istrec nous emmènent dans la ria d’Etel, située entre Quiberon et Lorient. Cette petite mer intérieure sur la cote morbihannaise comporte 2200 hectares recouverts par la marée dont 300 hectares exploités en ostréiculture. La culture de l’huître a commencé à la fin du 19ème siècle dans cet estuaire.


Ce territoire fait partie du réseau Natura 2000 en mer qui défend une gestion équilibrée et durable du site tant au niveau économique, social et environnemental. Les eaux de la ria d’Etel sont classées A (qualité et salubrité) mais l’équilibre est fragile notamment en raison de la pollution venant du continent. L’huître est un baromètre de la qualité de l’eau ce qui en souligne sa dépendance et sa vulnérabilité.

L’huître en breton se dit istr, l’Istreg signifie le pays de l’huître. C’est précisément dans ce berceau
que Jean-Noël et Tifenn Yvon élèvent leurs huîtres, celles que nous aimons à la Caravane.

L’Exploitation de Jean-Noël et Tifenn Yvon

Jean-Noël et Tifenn Yvon

Jean-Noël est issu d’une famille d’ostréiculteurs depuis quatre générations. Solidement ancré dans cette tradition, il a hérité et depuis défendu une pratique, des valeurs, une éthique d’une ostréiculture durable et solidaire. Tifenn dit avoir choisi l’ostréiculteur et en a épousé la passion.


Aujourd’hui le parc s’étend sur 14 hectares d’exploitation. Selon les schémas de structure de la profession, la production pourrait monter de 250 à 300 tonnes d’huîtres creuses par an. Ils ont décidé d’en produire 80 tonnes à l’année. De cette façon l’huître profite d’un espace nécessaire et suffisant à son développement et à sa qualité. Une partie du parc est laissé en jachère par rotation. Ils récoltent également des huîtres plates autochtones de la ria qui commencent à réapparaître en bancs naturels. Cette récolte actuellement ne représente qu’une infime quantité de leur production.


En général, tout au long de l’année l’équipe se compose de trois personnes. A partir de septembre jusqu’à Noël elle grossit jusqu’à atteindre 13 personnes à la pleine période de vente que représente les fêtes de fin d’année. Deux foires à leur actif : Dunkerque et Niewpoort en Belgique. La vente des huîtres se fait uniquement par commande.

Ils défendent et valorisent la culture de l’huître née en mer. Les écloseries, technique d’élevage artificiel, et les huîtres triploïdes, conçues en laboratoire et commercialisées sans étiquetage, ne font pas partie de leur vocabulaire sinon pour les dénoncer. Ils ont obtenu la mention Nature et Progrès (cahier des charges élaboré en 2019 ). L’huître de l’Istrec est devenue produit sentinelle pour la fondation Slow food qui accompagne les petits producteurs, préserve l’artisanat de qualité, tente de sauvegarder et de relancer un produit alimentaire menacé. Elle fait également partie du réseau Cohérence qui promeut des solutions alternatives rentables économiquement, écologiquement saines et socialement équitables.


Jean-Noël est un des piliers du syndicat mixte de la ria d’Etel (SMRE, crée en 2007) qui a instauré un dialogue entre les agriculteurs et les conchyliculteurs afin d’assurer une protection et une gestion de l’eau et des milieux naturels. Ce syndicat a notamment travaillé sur le bassin versant (territoire qui draine l’ensemble de ses eaux vers un cours d’eau ou vers la mer). L’impact de ce bassin versant sur la baie et les parcs ostréicoles influe sur la chaîne alimentaire qui a besoin d’un équilibre et d’un biotope particulier. Ce dernier est dépendant des apports d’eau douce. Le sol rincé amène les sels minéraux qui vont participer à la qualité du plancton, nourriture de l’huître. Si on a un bon apport de la terre, on a automatiquement un bon équilibre en mer.

Écouter Jean-Noël et Tifenn parler de leur passion nous fait entrevoir leur quotidien, leur symbiose totale avec le métier, l’environnement, le rythme des marées et la belle modestie qu’exige de travailler avec les lois de la Nature.

L’huître

Une huître ouverte

L’huître est un mollusque bivalve, hermaphrodite successive, en fonction des années et même pendant la saison elle change de sexe. À l’origine, Ostrea edulis, l’huître plate est endémique de la Bretagne. Deux parasites, la marteilia et la bonamia, à dix ans d’intervalle l’ont décimé dans les années 1970. Elle a été remplacée par l’huître creuse venant du Japon, Crassostrea gigas. Elle se reproduit l’été, les ovules et les spermatozoïdes sont expulsés dans l’eau pour assurer la fécondation.

La larve a besoin pendant 21 jours d’une température constante autour de 20 ° pour son développement. Elle va ensuite devenir pédivéligère (avec un pied) qui va lui permettre de se fixer.
Des collecteurs (tubes constitués de disques rainurés disposés les uns sur les autres ) vont être posés pour recueillir les larves. Cette opération s’appelle le captage. Les petites larves amalgamées les unes aux autres constituent un NAISSAIN. Ce dernier se nourrit et se développe jusqu’à devenir une huître adulte.

Le cycle de l’huître est dépendant des saisons, des élévations de température, des apports de l’eau de pluie à l’automne et en hiver. Les élevages n’existent qu’à la confluence des eaux douces et des eaux salées qui offrent les bonnes conditions à la vie du plancton, nourriture de l’huître. Elle pompe et filtre l’eau de mer pour capter les particules nécessaires à son alimentation et l’oxygène pour la respiration. Trois ans à trois et demi sont nécessaires pour amener l’huître creuse à maturité contre deux ans pour l’huître triploïde.

Le travail de l’ostréiculture

Les poches dans l’eau
Les poches posées sur les tables

« Le métier d’ostréiculteur, c’est de mettre les huîtres dans les meilleures conditions pour grandir ».
Ceci nécessite beaucoup de manipulations, de l’observation, de l’adaptabilité et une belle capacité à réagir.

Jean-Noël et Tifenn vont chercher leur naissain tous les ans au sud de la Loire où les conditions sont idéales pour la reproduction, les eaux bretonnes étant trop froides et trop instables au niveau de la température. Le naissain est immédiatement mis en poche (sac fermé en grillage plastique avec des mailles de tailles différentes) disposés sur des tables (structures métalliques) installées sur l’estran (l’espace découvert à basse mer). La poche calibrée en fonction de la taille de l’huître va devenir son habitat. Le courant va la traverser et elle va pouvoir filtrer le plancton. Ce système de poches permet aux huîtres un meilleur accès à la nourriture en les exposant aux courants et les protège des prédateurs (dorades, crabes, bigorneaux perceurs ) présents sur le fond.

Tout au long de l’élevage les poches sont tournées, dédoublées, changées de tailles de mailles en fonction de la croissance de l’huître. La culture se fait alternativement dans les poches et au sol. En poche, les huîtres profitent mieux, la chair va être de meilleure qualité. Au sol, elles éprouvent leur résistance, la coquille va se durcir pour les protéger. Le nombre de manipulations est impressionnant.

Avant qu’une huître arrive dans l’assiette, elle a été travaillée cinquante fois. Une fois leur processus de croissance terminé, les huîtres sont placées dans des bassins de décantation remplis d’eau de mer appelés dégorgeoirs.
En saison, elles sont immergées dans un bassin de trompage, recouvert par la marée qui va les obliger à rester fermées et qui va également servir de lieu de stockage. Avant l’expédition, pour les zones classées B, elles vont séjourner dans un bassin insubmersible vidé de son eau pour l’aider à mieux supporter le voyage.


Pour l’emballage et l’expédition, les huîtres sont lavées, brossées si besoin, triées, calibrées, rangées à plat dans des bourriches et mises en vente. De la surveillance et de la connaissance de l’ostréiculteur va dépendre la qualité de l’huître.
Jean-Noël dit de son métier :
« On voit, on sent, on entend au bruit. on est dans un milieu qu’on accompagne, en interaction constante avec lui. J’ai encore des milliers de choses à découvrir ».
Tous les sens sont requis, des sensations dépend la juste interprétation qui fait partie du savoir faire.


Tifenn décrit l’ostréiculture en ces termes :
« L’ostréiculture, métier vivant, totalement dépendant d’éléments aléatoires, a une seule certitude… Tout est lié… De mes pieds posés dans la vase, à mon corps plongé dans l’eau, au bout de mon bras donnant à ma main le toucher qui palpite, à mes yeux qui se lèvent pour regarder le ciel et les jeux du vent. L’huître, symbiose entre l’activité humaine à terre et la biodiversité de la mer, est un trait d’union ».
C’est ainsi que Jean-Noël et Tifenn travaillent, à la fois dans le respect de la nature et l’amour du travail bien fait.

Le changement de climat qui apporte à chaque automne son lot de découvertes inédites a des conséquences directes sur l’élevage des huîtres et leur croissance. Le taux de salinité de l’eau dépend des pluies et joue sur le développement de la végétation marine. L’ostréiculteur va devoir ajuster et anticiper le travail. De plus en plus, il faudra qu’il puise dans la connaissance de son métier pour répondre aux exigences nouvelles. À ce stade, le bagage accumulé années après années sera indispensable pour transmettre et assurer à l’ostréiculture un avenir.

Paysage de l’Istrec


Les huîtres de l’Istrec sont disponibles à la commande à la Caravane !

Le meilleur moyen de saluer le travail de Jean-Noël et Tifenn est de les goûter et de les apprécier !

Photos : Tifenn Yvon, Michèle Rolland
Rédaction : Michèle Rolland

A lire

Une réponse sur “Les huîtres de L’Istrec”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *